Ce 4 avril à l’Espace Henri Lasson à Antony, M. Jean-Charles Cuillandre présente une conférence intitulée Euclid : Premiers Regards sur l’Univers

Nous avons assisté à la conférence de M. Jean-Charles Cuillandre, astronome CEA-IRFU spécialisé dans l’imagerie optique et proche infrarouge à grand champ, depuis les détecteurs, les techniques d’observation et le traitement des données, jusqu’à la science au sens large permise par cette instrumentation.

Son parcours
• Formation d’ingénieur
• Doctorat en astrophysique à Toulouse avec Yannick Mellier (1996)
• 20 ans au CFHT (Canada-France-Hawai- Télescope).
• Depuis 2014 il a rejoint le CEA-Irfu pour intégrer la mission spatiale Euclid afin de contribuer
au développement du plan d’expérience et de lancer la campagne d’observations.
• 2024 récompensé pour son pipeline personnalisé de données qui a permis de générer les
magnifiques images en couleur de la mission Euclid.

Il propose ce soir de nous partager son enthousiasme sur les premiers résultats de la mission Euclid
Nous vous proposons ici un résumé de cette conférence (le support de présentation est disponible pour les adhérents en zone privée).
Jean-Charles a commencé par nous préciser d’où viens sa passion, un druide québécois, des pionniers de l’astrophotographie (David Malin, Serge Brunier) et comment cela l’a amené « tout naturellement » à exercer son art sur la mission Euclid.

La conférence a commencé par une présentation de la mission Euclid, où elle se situe dans l’écosystème de l’ESA (15% du budget alloué à la recherche) :

L’objectif d’Euclid est de traquer l’univers sombre.
– Cartographie de 2 Milliards de galaxies sur 1/3 du ciel jusqu’à 10 Milliards d’années dans le passé
– Travail dans le visible et proche IR
– Positionné au point Lagrange 2
– Un miroir de 1.2 m : « pas énorme mais dans l’espace ça voit loin »
– 5 mètres de hauteur
– Un champ de vue est de 0.5deg carré (2 fois la surface de la pleine lune)
– Un capteur VIS 620 Mpx de pixels (pour imager la forme des galaxies)
– Un capteur NISP (Spectro imageur) 64 Mpx pour mesurer le flux et le décalage spectral
– Mission initiale prévue pour 6 ans mais le bon lancement (Falcon9) lui permettra de travailler jusqu’à 12 ans. Les objectifs de cette suite sont encore à définir par l’ESA
– 20 ans de travail 12 ans de développement, 1600 membres (100 cosmologistes le reste d’astrophysiciens)
– Budget 1.3 milliards d’euros

Le travail de Jean-Charles Cuillandre
Après cette présentation du télescope, Jean-Charles nous a présenté ses activités sur la mission.
1 – Avant le lancement : Préparation de la mission
2 – Pendant la phase de calibration
3 – Pendant la phase d’analyse


– Phase de préparation de la mission
Avant le lancement Jean-Charles a contribué à la planification des pointages pour arriver à couvrir 1/3 du ciel en évitant le plan galactique (et ses cirrus), le plan de l’écliptique et les étoiles trop brillantes de notre galaxie (magnitude 4).

Euclid ne passera qu’une fois à chaque endroit; l’enchainement des vues est planifié notamment pour optimiser la consommation. Seules certaines zones (réduites) seront vues 40 fois pour étalonner le système (champ très profond) et ouvrir potentiellement vers de nouvelles sciences (en jaune sur la carte, ci-dessous).

– Phase de calibration : ERO (Early Release Observation)
Sur cette phase, le rôle de Jean-Charles a été de valider la chaine de traitement des images reçues.
Il nous a présenté un panel des différents défis techniques à relever (cf slides). On notera des challenges techniques comme le bruit du rayonnement cosmique (sur le VIS) et la rémanence des information (sur le NISP) qui ont été résolus par des algorithmes basés sur de l’apprentissage, le but étant d’ôter ces bruits et les remplacer, sans dénaturer l’information.

Pendant cette phase de calibration du télescope, Jean-Charles a obtenu des créneaux d’observation pour valider la qualité de l’optique et alimenter un minimum l’espace médiatique, en expliquant ce qu’est Euclid à un plus large public.
17 cibles en dehors du champ de l’étude principale ont été choisies. Ce choix de cibles s’est fait en fonction de la taille qu’elles représentent sur le capteur et d’un potentiel d’intérêt scientifique.
Cela donne les images (lien ci-dessous), pour comprendre ce que veut dire 620Mpx.
https://www.esa.int/Space_in_Member_States/FrancePemieres_images_d_Euclid_L_eblouissante_lisiere_de_l_obscurite
L’importance de la communication n’avait pas été initialement identifiée, il aura fallu argumenter pour arriver à ce résultat qui aujourd’hui, au sein du consortium, est “plus” naturel.
Son travail consiste alors, comme il le dit, à « aider à la ligne narrative » et « engager le public ».

Jean-Charles nous a ensuite expliqué son choix de palette chromatique sur les images en fonction des bandes spectrales du capteur. Pour lui, la palette doit conserver l’ordonnancement des longueurs d’onde, l’image ne doit pas dénaturer (ou le moins possible) la science.
Il reste cependant de la place pour faire du beau et de l’esthétique.

https://www.cea.fr/presse/Pages/actualites-communiques/sciences-de-la-matiere/mission-euclid-premieres-images-cartographie-Univers.aspx

Là aussi, de nouveaux défis techniques et de nouveaux traitements à imaginer (ex ghost des étoiles brillantes sur le dichroïque), traités par Machine Learning.

Data Release
On notera que contrairement au JWST, les données brutes ne sont pas immédiatement rendues publiques, elles sont exploitées d’abord par le consortium Euclid avant d’être diffusées. Cela évite les publications trop rapides et sans vérification de certains labos.

De la place pour l’émotion
Jean-Charles a insisté à plusieurs reprises sur la beauté de la Science, de ses Images.
Son travail ne consiste pas seulement à « générer de la Data » exploitable par ses confrères, mais aussi à créer de l’émotion aussi bien pour le grand public que pour ses pairs, il faut prendre le temps de contempler ses images et de voyager à l’intérieur.

Jean-Charles conclut sa conférence par une séance de questions réponses.

Résumé:
– L’objectif d’Euclid est de traquer l’univers sombre
– Euclid un télescope qui voit large
– Sur Euclid chaque pixel compte, et il y en a !
– Euclid un Beau Télescope, qui fait de Belles Images, pour de la Belle Science

Un grand merci à Jean-Charles Cuillandre pour avoir partagé son enthousiasme et nous avoir montré que la science peut aussi être esthétique.

@Fabrice

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